Stratégies de coercition reproductive utilisées en contexte intime et familial : une analyse féministe et interdisciplinaire

Abstract

Cette thèse de doctorat féministe et interdisciplinaire explore la coercition reproductive, une forme de violence basée sur le sexe/genre, exercée par des conjoints ou des membres du cercle familial pour contrôler la reproduction des femmes. Les auteurs de coercition reproductive utilisent un ensemble de tactiques pour imposer une maternité, provoquer ou forcer à poursuivre une grossesse ou, au contraire, contraindre à un avortement. Basée sur une approche qualitative, elle vise à: 1) enrichir les connaissances sur la coercition reproductive au Québec; 2) documenter les stratégies visibles et dissimulées de coercition reproductive en contexte conjugal et familial; 3) approfondir la compréhension des rapports de pouvoir en jeu dans ces situations. Ancrée dans une épistémologie féministe, cette étude s’appuie sur des théories féministes matérialistes et des concepts liés au contrôle coercitif et à la coercition reproductive. La méthodologie repose sur l’analyse des témoignages de femmes ayant vécu de la coercition reproductive intime et familiale (n=18), vivant au Québec et dont la moitié est immigrante. Elles ont été rencontrées par le biais d’entretiens semi-dirigés entre mai 2021 et mars 2023. L’analyse descriptive, thématique et par idéal-type a révélé diverses configurations relationnelles, des objectifs de coercition reproductive distincts et une variété de stratégies. Les résultats mettent en lumière, d’une part, les stratégies dissimulées utilisées par des conjoints dans des contextes de contrôle coercitif ou plus largement par des membres de la famille et, d’autre part, les quatre rôles-types joués par les membres du cercle familial dans les dynamiques de coercition reproductive. Les résultats illustrent un ensemble de tactiques reposant sur la violence psychologique, économique, spirituelle, sexuelle et physique et sur le contrôle des espaces et des déplacements comme un arsenal stratégique pour faire céder les femmes et prendre le contrôle de leur reproduction. Les forces et les limites de cette recherche sont identifiées et des pistes de recherche et d’intervention sont proposées. This feminist, interdisciplinary doctoral thesis explores the topic of reproductive coercion, a form of gender-based violence exercised by partners and family members to control women’s reproductive decisions. Perpetrators of reproductive coercion use a range of tactics to force women into becoming pregnant or continuing a pregnancy or, conversely, into terminating a pregnancy. The goal of the study’s qualitative research is to: 1) advance knowledge about reproductive coercion in Quebec; 2) document both the visible and covert reproductive coercion behaviours practiced in intimate and familial contexts; and 3) gain a deeper understanding of the power dynamics involved in these situations. Rooted in feminist epistemology, the study draws on materialist feminist theories and concepts related to coercive control and reproductive coercion. The methodology is based on an analysis of personal accounts given by women (n=18) who experienced reproductive coercion in intimate and/or family settings in Quebec, half of whom were immigrants. Semi-structured interviews were conducted from May 2021 to March 2023. The descriptive, thematic, and ideal-type analyses brought to light different relationship configurations, a range of reproductive coercion objectives, and a variety of coercive tactics. The findings highlight, on the one hand, the covert tactics used by partners and, more broadly, by family members in coercive control contexts, and on the other, four typical roles played by family members in the reproductive coercion dynamic. The findings also reveal a variety of tactics involving psychological, economic, spiritual, sexual and physical violence, as well as restricted freedom of movement, all of which are intended to force women into submission and seize control of their reproductive autonomy. The study discusses the strengths and limitations of the research and suggests avenues for future research and possible intervention.