L’exercice supérieur de l’écoute au cinéma : explorations théoriques et pratiques d’un monteur sonore devenu personnage conceptuel
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Mots-clés
- Cinéma
- Écoute
- Sound editing
- Sound
- Audiovisual
- Autopoietic
- Conceptual persona
- Editing practice
- Montage sonore
- Son
- Audio-visuel
- Auto-poïétique
- Personnage conceptuel
- Pratique du montage
- Création
- Listening
Organisme subventionnaire
Résumé
Cette thèse de recherche-création problématise ma pratique de monteur sonore de sorte à dégager les traits d’un exercice supérieur de l’écoute au cinéma. Pour ce faire, je m’engage dans une auto-poïétique et cherche ainsi à faire du monteur sonore que je suis un personnage conceptuel (Deleuze et Guattari). L’hypothèse principale est la suivante : le monteur sonore serait une « manifestation vivante » des mouvements et des modes d'existence de l'écoute au cinéma. Dressant le portrait du monteur sonore en penseur de l’écoute, je me propose entre autres de répondre au manque d'intérêt des théories du cinéma pour la diversité des formes d'écoute — ces théories s’étant plutôt concentrées sur le son comme matière d'expression. Dans un premier temps, je cherche à faire entendre la complexité de l'écoute au cinéma en faisant du montage sonore le lieu de sa conceptualisation : l'exercice supérieur de l'écoute est enveloppé dans l'exercice ordinaire du monteur sonore. Les gestes de composition du monteur sonore, repérés dans Punch-Drunk Love (Paul Thomas Anderson, 2002) et Bermudes (Nord) (Claire Legendre, 2018), deviennent alors les moyens par lesquels décrire et conceptualiser l’écoute au cinéma tout autant que la richesse de l’expérience audio-visuelle. Dans un deuxième temps, je mets de l’avant l’idée d’une désynchronisation du processus de montage sonore. Cette désynchronisation n'est pas seulement technique (format de fichier OMF, plugiciels de montage sonore), elle est aussi et surtout poétique et poïétique (monteur-au-mixage, pratiques collaboratives) : d’une part, elle aménage des opportunités pour repenser et enrichir les pratiques de montage et l’écoute au cinéma ; et, d’autre part, elle valorise l’inachèvement et l’ambiguïté fructueuse comme concepts essentiels à la création cinématographique. Dans un troisième et dernier temps, je m’engage dans la fabrication du personnage conceptuel du monteur sonore. Partant de mes expériences de montage sonore pour les films Bermudes (Nord), Nuits (Diane Poitras, 2014) et Bà nôi (Khoa Lê, 2013), je dégage peu à peu les traits d’un personnage conceptuel qui rendent visible, audible et pensable l'écoute du monteur sonore, ses gestes tout à la fois créateurs et analytiques, qui transforment le matériau sonore en une expérience significative et expressive — un exercice supérieur de l’écoute au cinéma.
This practice-based research thesis examines my work as a sound editor, aiming to highlight the qualities of a heightened practice of listening in cinema. To achieve this, I embark on an auto-poietic journey, endeavoring to turn the sound editor that I am into a conceptual persona (following Deleuze and Guattari). The central hypothesis is as follows: the sound editor can be seen as a "living manifestation" of the movements and modes of existence of listening in cinema. By portraying the sound editor as a thinker of listening, I aim to address the lack of attention that film theories have paid to the diversity of listening modes—these theories have tended to focus more on sound as a material of expression. First, I explore the complexity of cinematic listening by positioning sound editing as the site of its conceptualization: the heightened practice of listening is embedded within the everyday practices of the sound editor. The compositional gestures of the sound editor, as observed in Punch-Drunk Love (Paul Thomas Anderson, 2002) and Bermudes (Nord) (Claire Legendre, 2018), become the means by which to describe and conceptualize listening in cinema, as well as the richness of the audiovisual experience. Second, I put forward the idea of a desynchronization in the sound editing process. This desynchronization is not only technical (as in OMF file formats or sound editing plugins) but also, and more importantly, poetic and poietic (sound editor at the mix, collaborative practices): on the one hand, it creates opportunities to rethink and enrich sound editing practices and listening in cinema; on the other hand, it values incompleteness and fruitful ambiguity as essential concepts in cinematic creation. Finally, I delve into the crafting of the sound editor as a conceptual persona. Drawing from my experiences in sound editing for the films Bermudes (Nord), Nuits (Diane Poitras, 2014), and Bà nôi (Khoa Lê, 2013), I gradually outline the traits of a conceptual persona that renders visible, audible, and thinkable the sound editor's listening. that makes the sound editor's listening visible, audible, and thinkable. His gestures, that are both creative and analytical, transform sonic materials into a meaningful and expressive experience — a heightened practice of listening in cinema.